Aux prémices d’une collaboration, attention aux dérives

  • Post published:23 octobre 2023

Lors de pourparlers, vos interlocuteurs peuvent réclamer la fourniture d’échantillons afin d’évaluer la faisabilité du projet.

Cette remise s’effectue souvent sans qu’aucun accord n’ait été conclu, alors même que l’intéressé (artisan, créateur, entreprise des métiers d’art) a consacré temps et énergie à la conception d’un prototype sur-mesure.

Dans le meilleur des cas, une rémunération est versée en contrepartie de cette prestation.

Et puis… le futur partenaire décide de mettre un terme aux échanges.

Mais alors, quels sont les droits de ce dernier sur l’échantillon dont il a réglé la conception ?

L’hypothèse n’est pas isolée, comme l’illustre une récente décision

En l’occurrence, une créatrice de broches est approchée par un atelier en vue d’un partenariat avec un groupe cosmétique.

Aux termes des échanges, il s’agit de concevoir des modèles dont les photographies seraient destinées à promouvoir le lancement d’un nouveau parfum dans le monde entier.

Les parties conviennent par SMS des modalités de reproduction des représentations des modèles et la créatrice indique clairement qu’elle souhaite voir apparaître son nom dans les articles de presse évoquant le partenariat.

C’est dans ce contexte qu’elle remet à son futur partenaire des pièces uniques, dont le travail de conception fait l’objet d’une rémunération.

L’affaire semble s’arrêter là …

Puis, deux ans plus tard, elle découvre avec surprise que l’atelier exploite les visuels de ses pièces sur de nombreux supports de promotion et sur les réseaux sociaux, dans des conditions éloignées de leur « accord ».

C’est dans ces conditions qu’elle assigne l’atelier et l’industriel en contrefaçon de droit d’auteur.

Le premier jugement condamne les défenderesses et la procédure se poursuit devant la Cour d’appel de Paris.

Celle-ci observe tout d’abord que les modèles en cause sont bien originaux et bénéficient, à ce titre, d’une protection au titre du droit d’auteur

Au regard des échanges versés aux débats, elle considère que l’exploitation de visuels des échantillons pour la décoration de vitrines, le packaging de fourreaux de parfum, la conception de vidéos promotionnelles, l’habillage de scène, à fortiori pour le lancement de produits distincts de celui initialement prévu, dépasse largement les conditions convenues entre les parties.

Cet usage constitue un acte de contrefaçon qui donne lieu à dédommagement (presque 100.000 euros, tous chefs de préjudices confondus) ainsi qu’à des mesures d’interdiction.

CA Paris, 27 septembre 2023

Cet arrêt démontre qu’il est important de conserver la preuve de vos échanges en vue d’une collaboration.

L’exploitation non autorisée de prototypes transmis dans ce contexte, peu importe le règlement de la prestation et le profil du partenaire, peut en effet donner lieu à réparation.

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