Actualité Juridique – CA Paris, 5 avril 2023

  • Post published:16 juin 2023

Le recours à des fournisseurs est fréquent dans le domaine de l’artisanat et des métiers d’art.

Dans ce cadre, étudiez-vous vos conditions d’achat de fournitures ?

Il est important de vérifier qu’il existe une clause de garantie, notamment lorsque les fournitures portent sur des échantillons susceptibles d’être protégés au titre du droit d’auteur tels que des tissus à motifs.

Une telle précaution permet en effet de limiter votre responsabilité dans l’hypothèse d’une contrefaçon découlant de l’exploitation des fournitures en question.

Un exemple de condamnation récent d’un fournisseur permet d’illustrer ceci.

En l’espèce, une société crée, fabrique et vend en gros des textiles à des fournisseurs.

Un ancien client avait souhaité acheter l’un de ses tissus, ce qu’elle avait refusé.

Elle constate que le modèle concerné est exploité par une enseigne de la fast fashion espagnole sur une déclinaison d’articles :

N’ayant jamais autorisé l’exploitation de sa création, elle fait pratiquer une saisie contrefaçon au sein des locaux de l’enseigne afin d’obtenir le nom de son fournisseur.

Elle découvre alors qu’il s’agit de cet ancien client qui s’était montré intéressé par le tissu en question quelques années auparavant.

Ce dernier est assigné en contrefaçon et concurrence déloyale aux côtés de la filiale française de l’enseigne.

Le tribunal déboute la demanderesse au titre du droit d’auteur, considérant que le motif est dépourvu d’originalité.

Il condamne toutefois le fournisseur sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire.

Aucune des demandes formées à l’encontre de l’exploitant final, l’enseigne de fast fashion, n’est retenue.

La Cour confirme le jugement et relève que si le modèle ne peut accéder à une protection au titre du droit d’auteur compte tenu de sa relative banalité, il n’en demeure pas moins que les ressemblances entre celui-ci et le tissu incriminé ne peuvent résulter du hasard !

Elle retient ainsi que « la fourniture par le (fournisseur) à (l’enseigne espagnole), du tissu litigieux, très proche du tissu référencé 2505 MMPZ qu’elle savait être la propriété (de la demanderesse) est constitutif d’un acte de concurrence déloyale, la mise en œuvre de ce tissu sur des vêtements ensuite commercialisés par la (marque poursuivie) – en l’occurrence, une blouse et une robe – pouvant laisser penser que les tissus ont la même provenance et ainsi faire naître un risque de confusion, du moins aux yeux des professionnels de la création et de la vente de textiles destinés à l’habillement, (la demanderesse) exerçant en effet non pas une activité de vente au détail de vêtements comme (l’enseigne) mais une activité de vente de tissus en gros ».

En outre, le fournisseur est condamné sur le terrain du parasitisme dès lors que contrairement à la demanderesse, il ne justifie nullement « des « frais importants » qu’(il) aurait engagés pour concevoir le tissu litigieux ».

Lourde peine puisqu’il doit verser à la demanderesse la somme de 268 000 euros au titre des dommages et intérêts.

Et l’enseigne de fast fashion ?

La Cour rejette l’ensemble des demandes formées à son égard, relevant notamment :

  • qu’elle a coopéré en permettant d’obtenir le nom de la défenderesse ;
  • qu’il n’est pas établi qu’elle a cherché à s’arroger le droit d’utiliser le tissu litigieux en connaissance des droits de la demanderesse.

Le contrat devait certainement prévoir une garantie au profit de l’enseigne, d’où l’importance d’être attentifs à chaque acte commercial conclu.

Une question ? N’hésitez pas à contacter le cabinet.

Solène Daguier

Laisser un commentaire